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Une entreprise altruiste doit-elle se conduire de façon plus éthique que les autres ? 16 janvier 2007

Par Thierry Klein dans : Entreprise altruiste.
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Je continue sur le thème de « l’entreprise altruiste » et mes prochains billets ont pour but de commencer à préciser les caractéristiques de telles entreprises. Je m’intéresserai aux côtés juridiques, fiscaux, aux critères de sélection et d’évaluation de telles entreprises ainsi qu’aux côtés moraux.

Les entreprises altruistes ne diffèrent en rien des entreprises classiques, si ce n’est que leur capital (ou une partie significative de celui-ci) appartient à une cause de nature humanitaire.

Une entreprise altruiste doit-elle avoir un comportement éthique ? Une gestion éthique ? Je réponds non, ou du moins, pas forcément. Les entreprises altruistes doivent être à fond dans le jeu économique. C’est par la valorisation de l’entreprise et la rémunération de leurs actionnaires (plus-value, dividendes) que les entreprises altruistes font œuvre utile, car leur capital appartient à leur cause. Toute contrainte de gestion « morale » peut avoir pour conséquence une perte d’efficacité qui rendrait de telles entreprises non viables dans le jeu économique. Les entreprises altruistes peuvent – je n’ai pas dit « doivent » – avoir un comportement aussi agressif et aveugle que les autres.

Prenons comme exemple la fondation Bill Gates (voir le commentaire de CoeurdeRoy). Supposons qu’elle ait le choix entre ces deux investissements : un investissement de nature éthique à 2% et un autre, de nature non éthique, à 5%. Dans la mesure où son but est de lutter contre le SIDA, choisir l’investissement le moins rentable revient à affaiblir son action. Peut-être, à terme, le capital de la Fondation perdra-t-il trop de valeur ce qui pourrait conduire la Fondation à disparaître. Quels choix doivent alors faire les dirigeants de la fondation ?

Ma réponse, c’est : les choix qu’ils veulent.

Une entreprise altruiste peut évidemment décider de réaliser des investissements éthiques mais il s’agit là de son « libre arbitre ». Il est important qu’elle n’y soit pas obligée. La nature du mouvement que je veux créer n’imposera pas de norme sur le comportement de l’entreprise. Structurer son actionnariat au profit d’une œuvre suffit pour en faire partie.

Aller plus loin aurait des effets pervers sur l’efficacité de l’action altruiste elle-même. Surtout cela relèverait de l’intention moralisatrice. Ce serait le début d’un forme d’inquisition politiquement correcte – de toutes façons, si le mouvement altruiste prospère, il n’échappera pas totalement à cette forme d’inquisition bien-pensante (forécment bien pensante !). Il n’échappera pas non plus totalement aux abus – des associations qui utiliseront le capital donné à d’autres fins que le but initial (j’en parlerai dans un prochain billet). Autant bien définir dès le départ le cadre de l’initiative, pour limiter autant que faire se peut, les effets pervers.

Ajout : Cedric me suggère une simple modification de l’objet social d’une telle entreprise en me renvoyant vers l’excellent site The Corporation . Mais là encore, les mêmes raisonnements s’appliquent. Une entreprise altruiste peut avoir un objet social de nature éthique, il ne faut pas que ce soit une obligation structurelle. Et je crois qu’il est plus important de s’intéresser au capital de l’entreprise qu’à son objet social (sans doute une de mes réminiscences marxistes).

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Commentaires»

1. max - 26 novembre 2008

L’entreprise altruiste devrait donc maximiser sa rentabilité (et donc son effet sur la cause défendue) en dépit des barrières morales qu’induise une gestion « efficiente » (choix de l’investissemnt, gestion sociale, relations avec les tiers…). Un objet social peut-il etre considéré comme éthique si structurellement l’entreprise suppose une gestion moins regardante sur la question ethique?
plus directement: En quoi les notions de gestion éthique et et de performance sont-elles antinomiques?

2. Thierry Klein - 28 novembre 2008

Antinomiques n’est pas le mot. Je dirais plutôt « non corrélées ».

Et je n’ai pas écrit : « L’entreprise altruiste devrait donc maximiser sa rentabilité (et donc son effet sur la cause défendue) en dépit des barrières morales« .

Je pense juste qu’il est difficile d’imposer ce genre de choses sans tomber dans le politiquement correct, l’humarketing au sens négatif du terme… ou parfois, oui, l’inefficacité. Disons que le Capital Altruiste n’apporte strictement rien sur ce point.

Sans parler du fait que l’entreprise est une personne morale, on l’oublie un peu souvent, et que le mot « éthique » n’a pas grand sens dans ce contexte. (Parler d’éthique d’entreprise, c’est déjà le résultat du « marketing »).

Je pense que le billet sur « profit et bien commun« , et en particulier l’article de Bob Reich que je cite dans ce billet, décrivent assez bien ma position.

3. La refondation du capitalisme n’aura pas lieu - 12 janvier 2009

[…] contraire, je rappelle que le Capitalisme Altruiste se concentre sur les effets, non pas sur les intentions […]

4. Etude de cas : Speechi et le Capital altruiste dans chefdentreprise.com. - 11 mai 2010

[…] Le but du Capital altruiste n’est pas d’influer sur la gouvernance de l’entreprise, auquel cas il ne serait qu’un mouvement politiquement correct et économiquement inefficace de plus (voir ici quelques considérations fondatrices). […]

5. SODJI Freud - 11 juillet 2011

Bonjour,
Je suis un béninois, âgé de 35 ans et titulaire d’une licence en administartion générale. Je souhaiterais continuer mes études en faisant un master : management des ressources huamines ou des services publics ou autre lié à ma formation juridique.
Quelles sont les conditions puis-je remplir pour bénéficier de votre aide pour le financement de mes études pour l’obtention d’un master ?
Sinon comment pouvez-vous m’aider ? A quel organisme puis-je m’adresser ?
Je vous prie de recevoir, Madame/Monsieur, l’expression de ma haute considération.
Freud