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Le Nord : région numérique (ou pourquoi il faut prendre les choses par le bon bout) 11 avril 2006

Par Thierry Klein dans : High-Tech dans le Nord.
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Réunion stupéfiante ce soir, où le consultant chargé de l’animation a voulu partir des moyens et des actions nécessaires, avant de définir tout objectif, la raison invoquée étant que « la vision, c’est pipeau » (je simplifie à peine).

Résultat: la liste d’actions, de moyens, de besoins (etc) élaborée dans la réunion est si générique qu’elle pourrait convenir à la construction de tout pôle professionnel, qu’il soit numérique, artistique, sidérurgique ou que sais-je encore.

Or, si depuis des années, nous nous heurtons à une impossibilité de construire ce fameux pôle numérique, c’est bien par manque de vision, de liant. Tout doit partir absolument de là, sinon comment rassembler des entreprises aussi variées que des SSII, des sociétés de jeu vidéo, des consultants, des éditeurs, etc…

Ma vision, c’est qu’il faut faire du Nord la grande région européenne du numérique, le pendant européen de la Silicon Valley, que j’appelle, faute de mieux et pour l’instant, la Ch’tilicon Valley.

Oui, je sais, c’est sans doute un rêve. Oui, je sais, c’est sûrement très mégalo. Mais l’utopie a aussi quelques avantages très concrets: voilà lesquels.

L’un des enjeux est bien de peser comme pouvoir, ou contre-pouvoir vis à vis des politiques, des institutions et des média.

Comment un simple pôle professionnel numérique pourrait-il avoir la moindre influence, la moindre reconnaissance dans le Nord, qui est une région essentiellement axée sur le négoce ? Pour acquérir de l’influence, il faut avoir une ambition et la volonté affichée de dépasser le simple cadre professionnel. Créer l’excellence technique, créer les conditions nécessaires pour que dans 5, 10 ou 50 ans, le numérique pèse autant ou plus que la distribution, voilà un projet qui peut retenir l’attention. La notion d’un simple pôle de professionnels du numérique assemblés pour l’occasion dans le simple objectif de faire du business n’intéresse personne, on comprend facilement pourquoi (au contraire, dans le Nord, un tel pôle est vu comme une émanation patronale et avec une grande méfiance a priori par les politiques).

Au lieu de parler des « KSF » (Key Success Facctors, je sais, c’est du jargon mais je viens de subir ça pendant 3 heures), je vais vous parler des « KFF » (Key Failure Factors), c’est-à-dire de tout ce qui empêche aujourd’hui le Nord d’être une région sérieuse, qui peut avoir une certaine ambition dans le domaine du numérique. La plupart de ces handicaps sont développés dans mon billet d’hier, auquel vous pouvez vous reporter:

  • Le Nord manque dun tissu d’entreprises numériques performantes
  • Le Nord manque d’écoles et universités de premier plan
  • Au niveau politique, le Nord manque de compétence et de volonté d’avancer dans ce domaine. Les politiques n’ont pas assez detemps libre de cerveau disponible. Bonne raison pour les faire rêver (voir ci-dessus)
  • Le Nord manque de voies d’accès à des financements significatifs en capital
  • Les professionnels n’ont pas, jusqu’à présent, eu une stratégie cohérente, lisible et ambitieuse en tant que groupe (ça vient, Zorro est en train d’arriver, merci de ne pas rire).

Vous me direz que compte tenu de tous ces handicaps, nous sommes sûrs d’échouer ! Je pense que le Nord a quand même un atout énorme: le dynamisme et la capacité à travailler ensemble des acteurs, dans tous les domaines. Pour tout dire, j’ai pas mal voyagé – je suis un ch’ti importé – et je n’ai connu ça que dans une seule autre région du globe, qui est, justement, la Silicon Valley. Et tout part toujours de là.

Enfin, puisqu’on m’ a reproché de faire du pipeau, je reprends une liste d’actions concrètes, qui à mon avis peuvent être lancées rapidement, dès lors que nous sommes en phase sur les objectifs.

– une vision politique ambitieuse et présentable (et non pas un « plan d’action ». Ce n’est pas d’actualité et on n’est pas au Comité Central).
– définir des projets technologiques structurés d’envergure
– créer au moins un premier programme de formation de tout premier plan
– une initiative « Open Source » régionale pour fédérer des moyens de recherche et commencer à créer un tissu pour un coût presque nul (à comparer avec les investissements inutiles, plans calculs, incitations et autres dont les coûts sont pléthoriques et les retombées douteuses). Voir l’exemple de Skype.
– l’Open Source permet de baisser le capital nécessaire à la création d’entreprises innovantes.
– le basculement des investissements en licences logicielles vers des services autour de l’Open Source à un coût nul pour la Région.
– pour ceux qui ont tenu jusque là, une politique Open Source n’est ni l’alpha et l’omega de tout, ni une fin, juste un moyen possible !

– susciter des projets de recherche qui peuvent avoir des conséquences industrielles
– et par suite, non pas pour commencer, un pôle professionnel.

Evidemment, plein d’autres actions sont possibles et il faudrait récolter d’autres idées. Je pense cependant qu’il faudrait casser ce cycle de réunions ouvertes rassemblant une quinzaine d’acteurs et je préfèrerais nettemement élaborer un projet avec une équipe restreinte de 4 ou 5 personnes, projet qui serait ensuite soumis aux acteurs pour approbation – ou refus. Contactez-moi ou laissez moi vos impressions en commentaires.

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Commentaires»

1. N'en pense pas moins - 21 avril 2006

Oui, ces réunions successives sont épuisantes et jusqu’à présent inutiles. Le problème, c’est que la plupart des intervenants, dont moi, ne peuvent pas s’exprimer de façon aussi libre que dans ce blog…

2. Alfreddd - 22 avril 2006

Dans le genre, me fait penser aux réunions du "Pôle de compétitivité des industries du commerce" (où l’on parle d’ailleurs peut-être plus de numérique que de commerce…); est-ce pour toi un exemple de charrue avant les boeufs, ou au contraire un projet en bonne et due forme ?

3. Thierry Klein - 30 avril 2006

L’industrie du commerce est puissante et très entreprenante ici, et ça remonte au moins au moyen âge. L’e-commerce fait appel à plein de technologies innovantes (voix sur IP, Web 2.0, etc…) et ça ne me semble pas du tout absurde de trouver un axe technologie / commerce pour développer tout ce qui est High-tech dans le Nord. Le mariage Skype-eBay (Voix sur IP, e-commerce) montre bien les complémentarités possibles.