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Deux ou trois choses sans aucun rapport 5 octobre 2005

Par Thierry Klein dans : Politique.
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HP licencie. Le gouvernement monte au créneau et déclare qu’il va prendre des mesures (faire rembourser les aides ?). Comme il ne se passe pas grand chose, Jacques Chirac reproche à la Commission de n’avoir pas suffisamment réagi.

Un récidiviste tue un enfant. Le gouvernement déclare que dorénavant, tous les délinquants sexuels devront porter un bracelet, même ceux qui sont déjà libres.

Un fonctionnaire obscur du Ministère de la Défense Nationale sort une note « Confidentiel Défense » qui interdit l’utilisation de Skype dans les Universités françaises et tout le monde semble s’exécuter, bien que la note n’ait probablement aucun fondement technique ni juridique (et surtout soit totalement inadaptée).

Des marins détournent un bateau de leur compagnie en signe de protestation. Le lendemain, le gouvernement accepte une partie de leurs demandes et change le montage financier initialement prévu, qui résultait d’un appel d’offres. Les marins ne seront vraisembablement jamais condamnés.

Qu’est-ce qui rapproche ces différents points ?

Et bien chacun d’entre eux décrit un mini abus de pouvoir.

Si HP licencie, le gouvernement n’a strictement rien à dire compte tenu de la loi française. (Si on juge que la loi est inadaptée, on peut vouloir la changer mais en appliquant des règles non écrites à HP, on sort de l’état de droit).

On peut évidemment faire passer une loi pour condamner les délinquants à libérer à porter un bracelet. Mais les délinquants déjà libres ont été libérés sous d’autres termes et ils ont des droits comme les autres (si j’ose dire).

On peut juger que Skype est dangereux pour la Défense Nationale (quoi que…). Mais dans ce cas, il faut interdire Skype sur tout le territoire comme moyen de communication et il y a des procédures adaptées pour ça, qui justement permettent de motiver la décision au sens juridique et démocratique du terme.

Si un appel d’offres « dans les règles » a eu lieu pour vendre la SNCM, il est choquant – et probablement illégal – d’en changer du jour au lendemain l’issue comme le fait le gouvernement. Dans un pays où les moyens d’expression légaux ne manquent tout de même pas, il est choquant aussi que les marins ne soient pas condamnés.

Pour chacun des points ci-dessus, je ne prends pas du tout position sur le fond des problèmes et dans un état de droit, on ne devrait même pas avoir à se poser la question (sauf cas tout à fait exceptionnel, bien sûr). Si la loi n’est pas bonne, on peut militer pour la changer, mais on ne l’applique pas a posteriori en fonction des humeurs de chacun – ou sinon, c’est la dictature (du gouvernement, des medias, des bureaucrates, des syndicats, etc…) et le clientélisme.

Le fait est qu’en France, nous sommes tellement habitués à ces « mini coups de force » que nous ne les voyons même plus. Pourtant, ils nous empêchent d’entreprendre, nous font vivre dans une sorte de dictature et nous rendent ridicules et incompréhensibles auprès des autres grandes démocraties.

Complément: dans la même veine, voir un ancien billet sur les réactions des politiques face à la décision du Comité International Olympique (Déception, fureur… et volonté a posteriori de changer les règles…). On parle bien de la même chose.

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Commentaires»

1. pierre - 12 octobre 2005

Bonjour !

Je vis et travaille dans un pays nordique… et même si les politiciens sont les mêmes que les nôtres (tentation de contourner la règle..), je dois quand même constater que le fonctionnement des institutions est beaucoup plus serein. Il y a parfois des choses surprenantes, comme un chef de la police amené à démissionner pour avoir utilisé quelques fois à des fins personnelles un 4×4 du service. Après 10 années en France où "l’abus de bien sociaux" est un sport national tant dans le public que dans le privé (et à tous les échelons, hélas), je dois bien reconnaître que mes observations au quotidien sont une bonne leçon pour le citoyen d’une République qui prétend toujours éclairer les autres pays. C’est très reposant de ne pas être exposé à ces "mini coups de force" permanents. On peut consacrer son énergie et sa créativité à des choses utiles plutôt qu’à de vains combats.